1 février 2011
bric à bloc de janvier mais… pas de soldes !
Posté par Paul dans la catégorie : Bric à blog .
Avec les événements qui se déroulent actuellement en Tunisie, en Egypte ou dans d’autres pays arabes, il est important, outre les sources d’information usuelles, d’aller faire un tour sur « Global Voices » le site qui publie une revue mondiale des blogs en dix-huit langues différentes. Chaque jour apporte son lot de nouvelles traductions, et il est important d’avoir, sur ces graves questions d’actualité, le point de vue des acteurs sur le terrain. Certes, celui-ci est souvent partiel, et parfois très partial, mais il permet de prendre la température d’un mouvement social et surtout de jauger les espérances de ceux qui y sont directement impliqués. Voici le lien direct sur le dossier sur l’Egypte qui contient de nombreuses photos et de nombreux témoignages sur les manifestations au Caire.
Le gouvernement égyptien est parfaitement au courant des enjeux que représentent le contrôle des médias (déjà bien assuré) et celui des différents réseaux sociaux sur Internet. D’où la décision prise, très rapidement, de bloquer tous les accès au web, que ce soit pour les particuliers ou même pour les entreprises (ce qui n’a pas été réalisé en Tunisie). Seule la Bourse du Caire est encore reliée à la Toile, affaires financières obligent. Quel rôle a joué, et quels rôles peuvent jouer les différents réseaux sociaux (Twitter, Facebook..) dans un conflit de cet envergure ? Le débat a pris de l’ampleur au moment des manifestations en Iran, à l’automne. Il rebondit depuis l’insurrection en Tunisie et en Egypte. Le sujet est d’importance et les publications ne manquent pas.
Beaucoup de discussions reposent sur du vent, mais d’autres s’appuient sur des faits nettement plus concrets. Ce dossier m’intéresse car cela fait longtemps que je travaille avec Internet. Je ne suis malgré tout qu’un utilisateur lambda qui essaie de comprendre ! Je vous propose plusieurs références d’articles. Sur le Monde, tout d’abord, le texte « Les cyberactivistes d’Anonymous désemparés face au blocage » fait le point de façon sérieuse et documentée sur les méthodes utilisées par les autorités égyptiennes pour mettre en place le blocage : différentes procédures peuvent en effet être mises en œuvre et toutes ne présentent pas le même degré d’efficacité. En Egypte, le gouvernement a frappé fort et vite, et la mise en place de contournements, accessibles au commun des mortels, s’avère difficile. Article de fond sur « Framablog » également : « A quoi ça sert de s’activer sur Internet » – réponse formulée par Cory Doctorhow, l’une des personnalités qui réfléchit sur les potentialités d’internet aux critiques formulées par Evgeny Morosov, chercheur biélorusse à l’université de Georgetown, auteur d’un livre critique sur Internet, outil d’émancipation des peuples, intitulé « The Net delusion : the dark side of Internet freedom ».
Le site d’informations « OWNI, société, pouvoirs et cultures numériques » que je trouve de plus en plus intéressant de par son contenu, s’interroge sur le retour en force d’un media « classique » en l’occurrence « Al-Jazeera » et du rôle que joue cette chaîne de télévision. Certes, « Al-Jazeera » est contrôlée par le gouvernement du Qatar, mais il semble que ce soit, à l’heure actuelle, la source d’information la plus utilisée par les médias du monde entier. Indépendance ou liberté surveillée ? Contre-pouvoir à l’encontre de CNN par exemple ? Ce qui est sûr c’est que là aussi la censure égyptienne a frappé : les citoyens ne peuvent plus capter « Al-Jazeera » depuis samedi.
Pour finir cette revue du web centrée sur les soulèvements populaires dans le monde arabe, je vous signale aussi ce texte intéressant sur la Tunisie : la lettre d’un journaliste marocain à notre prince hongrois. « Laissez les peuples maghrébins décider de leur sort« . Il est grand temps que cesse l’hypocrisie des gouvernements français successifs. Ce n’est pas à cause de la grandeur d’âme de nos ministres que le matériel de répression destiné à la police tunisienne a été bloqué à Roissy… C’est un simple problème de paperasserie…
« L’arbre à palabres » de notre amie Zoë va me permettre d’effectuer la transition, toujours difficile, vers d’autres sujets. On parle relativement peu de l’Islande et des changements profonds qui s’y manifestent à l’heure actuelle. Zoë fait un parallèle entre la situation en Tunisie et l’évolution profonde que connaît la République Islandaise. Révolution discrète comme l’ont avancé (sans doute avec un peu trop d’enthousiasme) certains chroniqueurs, ou simple aménagement politique. Je vous invite à lire ce billet intitulé « Dansons la carmagnole au son des casseroles » sur l’arbre à palabres. Ce que l’on peut en conclure, en tout cas, c’est qu’il se passe plus de choses au Nord et au Sud de l’Hexagone qu’à l’intérieur de nos immortelles frontières. Je ne sais pas pour vous, mais moi, en ce qui me concerne, les querelles internes à la majorité gouvernementale ou à celle d’en face me laissent totalement indifférent. Un billet récent de Fabrice Nicolino sur « Planète sans visa » m’a bien plu même si je ne partage pas toutes ses conclusions. Ça parle d’anarchie et ça ne pouvait donc me laisser indifférent ! Plusieurs des commentaires postés par les lecteurs sont intéressants aussi, notamment les références à divers penseurs contemporains dont Murray Bookchin par exemple.
Suite aux dernières interventions écrites ou orales de Stéphane Hessel dans le débat citoyen, ou à la diffusion, confidentielle, du film « Walter, retour en résistance », on parle beaucoup ces derniers temps de la Résistance à l’occupation nazie de la France et du programme du Conseil National de la Résistance. Là aussi j’ai déniché un texte intéressant à lire, parmi d’autres, sur le site Bellaciao. Il s’agit d’un article intitulé « l’Affaire de Signes« . Nos chers dirigeants semblent supporter de plus en plus mal les multiples références à ce fameux programme du CNR et notamment la liberté de ton que se permettent les quelques survivants des maquis. Le 2 janvier dernier, la cérémonie d’hommage rendu aux maquisards fusillés par les Nazis à la ferme de la Limatte près de Signes dans le Var a tourné à l’échauffourée diplomatique entre les différents élus et officiels présents… L’auteur reproduit le discours fort joliment tourné de Claude Roddier, à l’origine de la crise d’urticaire des représentants gouvernementaux. Prenez cinq minutes pour le lire. S’il est souhaitable que nos revendications, dans les mois à venir, aillent plus loin que les propositions d’époque du CNR, encore faudrait-il au moins être capables de conserver ce qui a été laborieusement acquis ! L’adversaire est clairement identifié et il n’a plus aucune honte à afficher ses intentions : « Adieu 1945, raccrochons notre pays au monde ! Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. (…) Il est grand temps de le réformer» (déclaration de Denis Kessler, ancien apparatchik du MEDEF, en 2007).
De Résistance à déportation, il n’y a qu’un pas à franchir… Je ne m’en prive pas pour vous envoyer sur le site de la revue libertaire belge « Divergences » et cette présentation faite d’une Bande Dessinée de Maurice Rajsfus : « Le petit Maurice dans la tourmente, 1940-1944. Quatre ans parmi les sous-hommes« . Une petite citation pour vous mettre dans l’ambiance : « Si la police française ne s’était pas mise aux ordres, jamais il n’y aurait eu autant de dégâts. Il y a eu 150 000 déportés de France, dont 76 000 juifs, les autres étant des déportés politiques (résistants, communistes, otages…). Et que dire de ce policier qui, rendant compte à la préfecture de sa mission, ose écrire, le 22 juillet : » Le Vél’ d’Hiv’ est évacué. Il restait 50 juifs malades et des objets perdus, le tout a été transféré à Drancy. » Pour de nombreuses raisons, parmi lesquelles bien entendu celle-ci, j’ai quelque peine à envoyer un quelconque message de soutien aux CRS craignant de perdre leur emploi qui ont entamé une grève de la faim. Nous ne serons jamais du même côté de la barricade… Aux dernières nouvelles il semble d’ailleurs que les CRS obtiennent plus vite gain de cause que les enseignants…
Parlons un peu d’urbanisme, ce qui n’est pas fréquent dans ce blog bien que ce soit pourtant un sujet sur lequel il y ait beaucoup à dire… Je vous propose deux liens d’un genre très différent. J’ai d’abord découvert une étude intéressante sur l’agriculture en milieu urbain, avec un exemple assez surprenant : il s’agit de cultures sur le toit d’une usine désaffectée à Brooklyn. L’article s’intitule « des jardins potagers sur les toits« . Après tout pourquoi pas ? Après les murs décoratifs et les toits végétalisés, pourquoi ne pas joindre l’utile à l’agréable… « Elle est où maman ? Elle cueille des radis sur le toit de l’immeuble mon chéri ! » Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il n’y a aucun risque pour l’étanchéité des toitures, au contraire… Je cite : « On estime qu’il s’agit même d’une protection supplémentaire de l’étanchéité car il n’y a plus d’attaque des ultra violets sur les membranes étanches qui sont constituées sur les toits en général d’huile de bitume. Le bâtiment est ainsi protégé contre les chocs thermiques. Une toiture exposée au soleil peut atteindre une température de surface de 65 degrés alors que si la membrane est recouverte de végétaux l’on est à 15 à 20 degrés. »
Mieux vaut investir dans cette direction-là plutôt que de multiplier les effets décoratifs architecturaux d’un goût de plus en plus douteux. Le fin du fin en ce moment c’est la multiplication des colonnades pour décorer les façades. Dans nos campagnes, la moindre villa se transforme en temple romain, grec ou égyptien selon les goûts plus ou moins douteux du propriétaire et les choix proposés par le catalogue du promoteur immobilier. Le phénomène est en pleine expansion et la réglementation administrative souvent tatillonne qui met des bâtons dans les roues à la réalisation de nombreux projets intéressants va laisser passer, sans le moindre scrupule, les pires aberrations architecturales. Dans son blog, « Rendez-vous du Patrimoine« , Isabelle Rambaud s’intéresse à ce phénomène curieux qui semble gagner même les façades des immeubles en milieu urbain. Outre ce sujet, elle en a traité de nombreux autres, tout aussi passionnants, au mois de janvier. Un blog décidément incontournable pour quiconque s’intéresse un tant soit peu à ces questions.
Parmi les livres que nous apprécions beaucoup à la maison, il y a ceux de la collection « Terre humaine », dirigée par Jean Malaurie, qui occupent une bonne place (cf notamment article récent de Pascaline sur les sourds et le langage des signes). Au hasard de mes pérégrinations, je suis tombé sur ce très bel éloge de Michel Ragon, consacré à la collection et à la réponse que lui a rédigée Jean Malaurie. Michel Ragon expose ses idées sur « la voie libertaire » et la manière dont il perçoit les ouvrages sélectionnés par Jean Malaurie. Ce très bel extrait pour vous mettre en appétit : « Si j’ai dédié la Mémoire des vaincus, roman de l’anarchie et des anarchistes de notre temps, à Jean Malaurie, c’est que celui-ci est un esprit libre et sa collection « Terre Humaine » une exceptionnelle entreprise libertaire dans un milieu universitaire où les sciences sociales sont phagocytées par les néo-positivismes et les marxismes. Je dis bien libertaire car Jean Malaurie y donne la parole à ceux qui n’ont jamais la parole : tous les exclus de notre société de la production pour la production et du spectacle pour le spectacle ; les déracinés, les émigrés, les marginaux, les nomades, les parias, les sauvages ; les analphabètes, les derniers habitants des déserts et des marais ; les derniers villageois ; les hommes attachés à des métiers qui tombent en désuétude ; les ethnies à la dérive : Esquimaux, Lapons, Sioux, Iks, Urubu, Polynésiens, etc. Une dérive qui affecte non seulement les pays du Tiers Monde, mais tous nos concitoyens du Quart Monde. Terre Humaine est la mémoire d’un type de civilisation que le communisme, comme le capitalisme, l’université comme l’école, ont entrepris avec succès de détruire. C’est une bibliothèque de la mémoire populaire, dédiée aux hommes les plus humbles et aux peuples les plus déshérités ; une bibliothèque qui, sous couvert de l’ethnographie, est une entreprise foncièrement révolutionnaire. »
Remarquable non ? Devinez dans quelle collection a été publié le livre « Chronique des indiens Guayaki » de l’ethnologue Pierre Clastres, qui revendiquait clairement ses liens avec le mouvement libertaire ? Je reconnais que la réponse à cette question est facile…
On termine, comme le mois dernier, par un peu de musique. Allez faire un tour sur le blog « Alexandre Jacob l’honnête cambrioleur » et consacrez quelques minutes à écouter les paroles de la chanson « la bande à Riquiqui« … Perso, la musique ce n’est pas ma tasse de thé, mais les paroles me plaisent bien. Sachez que ce texte, qui tape en plein dans le mille de notre actualité sociale, a été écrit par Jean-Baptiste Clément, soi-même, preuve qu’il ne s’intéressait pas qu’à la cueillette des cerises et autres travaux champêtres.
« La Parisienne libérée », ça vous dit quelque chose ? Cherchez bien dans votre mémoire… L’affaire de Tarnac (l’un des multiples coups d’éclat de notre mirifique MAM)… La chanson « hyper ultime totale gauche »… Toujours rien ? Ce n’est pas grave, fouillez dans les archives de la Toile et vous trouverez cette chanson culte. En attendant, « la Parisienne libérée », une personne absolument charmante, vous présente ses meilleurs vœux pour 2011 en musique. Certes, on est le 31 janvier, mais il n’est jamais trop tard pour bien faire… Ça s’intitule « Bonne année » et c’est bien réjouissant… enfin, façon de parler !
Addenda spécial « Copinage » – Connaissez-vous « N’Autre école » la revue de la CNT Education ? Un p’tit communiqué au passage…
L’école dans 10 ans ? Un numéro qui croise imagination (5 nouvelles signées Ayerdhal, Yohan Heliot, Yves Grevet, Jean-Pierre Levaray, Yves Pinguilly) et analyse.
L’avenir a-t-il une suite ? Dans ce second volet de notre dossier « L’école dans dix ans », nous avons tenté de renouveler notre approche et de conduire le lecteur vers cette question qui clôt provisoirement « l’aventure » : comment sortir du cauchemar ? Conjugués au futur, les cauchemars sont des garde-fous : ils nous disent les dangers possibles, ils nous incitent à nous réveiller. À retourner au réel, à y construire du positif, à ne pas céder au repli. Attention, il ne s’agit pas de faire dans l’optimisme de commande ; nous sommes bien dans un temps de dangers et d’incertitudes. Mais « ne rien tenir pour assuré engage à combattre comme si rien n’était impossible. » (Raoul Vaneigem)
L’avenir sera surtout fait de surprises et d’inattendu, à l’image de cette révolte d’octobre – un peu trop sage – qui est quand même venue bousculer le train-train de cette rentrée 2010 et… l’agencement de notre numéro ! Nous lui consacrons en effet un mini-dossier, en espérant contribuer à un éclairage différent pour lancer la réflexion sur ce nouvel épisode des luttes sociales. La suite ? au prochain numéro, comme on dit dans ces cas-là.
Pour permettre aux lecteurs de découvrir la revue nous proposons un envoi gratuit du numéro en Pdf sur simple demande à nautrecole@cnt-f.org
N’Autre école n° 28 : 4 € en version papier, 2 € en version électronique
Abonnement : 20 € pour 5 n° (revue N’Autre école, CNT-FTE, 33, rue des Vignoles, 75020 Paris, chèques à l’ordre de CNT-FTE) commande en ligne possible sur le site
http://cnt-f.org/nautreecole/
2 Comments so far...
Zoë Says:
2 février 2011 at 16:15.
Merci Paul, j’ai relayé sous l’arbre pour le site dossier d’Egypte. Je découvre la Parisienne et ses voeux plutôt acides et toutes les bonnes choses offertes ici à notre gourmandise. Je ne suis pas très active sur mon blog, je prépare mon départ pour Dakar où je vais aller voir de plus près si un autre monde est possible. J’en parlerai au retour. bien amicalement
JEA Says:
3 février 2011 at 15:37.
Merci aussi pour les étoiles filant vers d’autres sites.
Et bon vent à Zoé…