24 octobre 2008
Sur les routes de Slovénie…
Posté par Paul dans la catégorie : Carnets de voyage .
2 – de Ljubno au Triglav
La journée de repos à Kladje nous fait le plus grand bien. Elle nous permet de faire une très belle balade en dessus de la ferme : un circuit prévu pour 3 h de marche tranquille dont la durée finale sera d’au moins cinq heures car décidément nous ne sommes pas très doués pour l’orientation. Le sentier chemine à travers des paysages très variés et très agréables et, à force de grimper et de descendre, le dénivelé cumulé finit par ne plus être négligeable. La soupe bien épaisse servie en entrée pour le dîner est plus qu’appréciée ! Le lendemain, nous quittons notre lieu de villégiature avec regret. Certes, nous ne sommes que des touristes de passage et d’autres nous remplaceront, mais il n’en reste pas moins que nous avons eu l’impression de pénétrer, un bref instant, dans l’intimité de cette famille et d’être un peu plus que de simples « clients ». Nous avons l’intention de faire une première étape à l’arboretum que nous avons localisé à quelques kilomètres de la ville de Kamnik. Nous sommes un peu inquiets à cause de la météo, mais, depuis que nous sommes en Slovénie, nous avons réussi à jouer à cache-cache avec les nuages sans trop de difficulté.
Selon notre bonne vieille habitude, nous perdons une demi-heure à trouver le parc car les panneaux de direction envoient les visiteurs vers un immense terrain de golf. Nous abandonnons les messieurs encravatés à leur parcours sportif en voiturettes électriques et, avec un peu de persévérance, nous arrivons enfin à l’arboretum de Kamnik. L’endroit est agréable à visiter : il s’agit de l’ancien domaine d’une riche famille de la bourgeoisie locale et de magnifiques spécimens d’arbres anciens côtoient les nouvelles plantations. La signalétique est un peu limite et il est dommage que certaines curiosités botaniques ne soient pas mieux annoncées. En se promenant dans le parc on découvre de magnifiques espaces aménagés : un jardin à l’anglaise, un étang fleuri bordé par de superbes cyprès chauves dont les pneumatophores décorent la berge, d’immenses massifs associant des fleurs aux coloris variés… Beaucoup de plaisir pour les yeux, mais pour les oreilles aussi car les oiseaux s’en donnent à cœur joie dans ce petit paradis de verdure.
La région de Bled est très touristique et nous préférons ne pas dormir au bord du lac. Sur notre guide d’hébergement dans les fermes, nous avons repéré une adresse dans un petit village, un peu à l’écart. Pour une fois, nous trouvons sans peine ; il faut dire que nous disposons d’une indication essentielle : le bâtiment se trouve en face de l’église du village… Quoique… Un tel renseignement n’est parfois pas suffisant car un village peut posséder toute une collection d’églises. Ici, il n’y en a que deux : l’une pour la partie basse de l’agglomération, l’autre pour la partie haute. Mon œil averti repère tout de suite la fumée de l’alambic qui est en train de chauffer sous un petit hangar. La grand-mère qui s’occupe du gîte est occupée à distiller du moût de raisin (?) pour fabriquer la fameuse slibovice (officiellement, il paraît que c’est de la prune…). Ce n’est pas à ce breuvage que nous devrons l’excellent souvenir que nous avons gardé de Bled, car, nous ayant sans doute jaugés d’un coup d’œil, la brave dame doit se dire que si elle nous fait déguster le liquide (pourtant limpide) qui coule goutte à goutte dans la bouteille de verre, nous allons repartir les pieds devant. Pendant toute la durée de notre bref séjour dans ce village de Gorje, notre pratique linguistique va faire un sacré bond en avant. Notre hôtesse s’exprime dans un mélange d’anglais, d’italien, d’allemand et de slovène qui rend les conversations extrêmement pittoresques. Chacune de nos réponses à ses questions est ponctuée d’un « gut, gut » très rassurant… Nous aimons les plantureux déjeuners qu’elle nous propose ? Gut, gut ! Nous n’avons plus faim après avoir ingurgité le quintal de nourriture du dîner ? Gut, gut ! Nous aimons cette région du parc du Triglav ? Gut, gut ! Elle semble bien nous aimer en fait et a décidé de ne pas nous utiliser comme cobayes pour sa slibovice.
Je vous rassure tout de suite : pendant ces deux journées passées dans les environs de Bled, nous n’avons pas fait que manger quand même ! Nous avons exercé intensément notre métier de touristes, c’est à dire, visiter, marcher, admirer, photographier, marcher… Nous avons accompli l’incontournable pélerinage en barque sur le lac de Bled, en direction de la magnifique petite église perchée sur l’adorable petite île rocher. La barque traditionnelle était belle, le gondolier sympathique… C’est effectivement l’un des plus beaux lieux de Slovénie, mais résumer le pays à cette localité, comme le font certains guides de voyage, c’est vraiment du gâchis. Une fois que l’on est basé dans les environs de Bled, il y a une autre excursion incontournable, ce sont les gorges de Vingtar que l’on parcourt à pied en une à deux heures. Là aussi il s’agit d’un « classique ». Nous avons effectué ces deux visites à une période où la fréquentation touristique était un peu calmée, et vraiment, nous nous sommes régalés. Mais, ce dont je voudrais vous parler plus, c’est d’une autre excursion, beaucoup plus « hors des sentiers battus », bien que nous l’ayons repérée aussi grâce à notre guide : il s’agit des gorges de Pokluska, une dizaine de kilomètres plus loin que Vingtar, en direction du parc du Triglav. L’accès est moins commode et les cars ne peuvent s’y rendre ce qui explique qu’elles attirent moins de visiteurs. A notre grande surprise, lorsque nous arrivons dans la clairière qui sert de parking, il n’y a carrément personne. Il faut dire qu’au départ du sentier figure un panneau indiquant (à grand renfort de pictogrammes) « accès interdit »… Nous n’allons pas renoncer en aussi bonne voie ! Ne voyant pas ce qui peut motiver l’interdiction, nous décidons simplement d’être prudents. En fait, le risque est modéré, comprendrons-nous plus tard : un orage violent a probablement provoqué une crue dans la gorge et le sentier aménagé a été « balayé » en de nombreux endroits…
S’il y a une visite que nous ne regrettons pas c’est bien celle-là. Les gorges de Pokluska offrent au visiteur un décor grandiose mais celui-ci ne se dévoile que peu à peu. La promenade commence dans un sous bois vallonné, puis peu à peu, les parois s’élèvent, se resserrent et deviennent de plus en plus tortueuses. On progresse peu à peu dans les éboulis, un œil inquiet dirigé vers le ciel car il y a parfois des surplombs qui ne sont guère rassurants. Après tout, les pierres que nous contournons viennent bien de quelque part ! Il y a de nombreux trous dans les falaises et plusieurs entrées de grottes sont visibles. Après avoir cheminé pendant une demi-heure dans ce décor lunaire, nous décidons de faire demi-tour. Le sentier semble devenir plus acrobatique et, bien qu’irrespectueux des interdits, nous ne sommes pas totalement inconscients. Il faut dire aussi que le silence devient oppressant. Le décor évoque celui du « seigneur des anneaux »… On pourrait facilement s’imaginer en train de pénétrer au cœur du royaume du Mordor…Heureusement, nulle créature ténébreuse ne nous attend au détour du chemin. Le seul monstre que nous aurons à affronter est un gros chien de berger, à l’entrée du défilé. L’animal n’a pas l’air très décidé à nous laisser regagner notre véhicule… Nous décidons d’aboyer un peu plus fort que lui… Profitant de l’effet de surprise, nous nous réfugions dans notre forteresse roulante et le monstre, vexé, repart, l’air de rien, vers sa propriétaire que nous croisons une centaine de mètres plus loin, sur la route…
La journée se terminera en voiture. Il faut dire que le temps est de plus en plus menaçant. Nous prenons l’une des routes permettant d’accéder au cœur du parc du Triglav. L’ambiance ne change guère par rapport aux gorges : sous le ciel noir, les immenses sapinières qui recouvrent les plateaux ont quelque chose d’un peu sinistre. C’est incroyable de voir à quel point la lumière peut changer la perception que nous avons d’un paysage. Nous arrivons au « bout du monde ». Le lieu se nomme Rudnopolje. Point de départ de la célèbre excursion pour le mont Triglav, station de ski de fond en hiver, l’endroit est sûrement très animé au cœur de l’hiver et de l’été… Mais là, fin septembre, sous la pluie, il y a autant d’animation que dans une galerie marchande au milieu de la nuit. Retour à l’alambic, non pardon, au bercail. Le lendemain, nous partons pour le Sud-Ouest de la Slovénie : l’Istrie, la ville de Piran, en passant par le parc des grottes de Scokjan. Ce sera là le troisième et dernier volet du récit de notre voyage…