11 avril 2014
Agitation printanière
Posté par Paul dans la catégorie : Notre nature à nous .
Le printemps est là et bien là. On s’en rend compte bien sûr avec tous les signaux que la nature envoie, mais aussi par l’agitation frénétique qui règne dans la maison et rend difficile la possibilité d’avoir des moments calmes réservés à l’écriture. Nos premiers travailleurs volontaires du réseau Helpex sont arrivés en mars et déjà repartis. Nous en sommes déjà à la « deuxième génération » et bientôt à la troisième. Lorsque nous ne connaissons pas encore nos invités, nous préférons des séjours courts, de deux semaines en moyenne, qui permettent d’aplanir bien des difficultés pour les uns comme pour les autres. Le revers de la médaille c’est que cela oblige à renouveler souvent les explications, mais aussi le fait que les séparations sont souvent difficiles. Cela a été le cas avec la petite équipe du mois de mars, un couple de jeunes Italiens et une Australienne avec qui nous avions d’excellents rapports. Nous reverrons sans doute certains un jour, mais d’autres non. Ajoutons à cette activité d’échange de services, l’hébergement pour un ou deux jours de voyageurs dans le cadre de l’association BeWelcome (principes de fonctionnement en réciprocité similaires à ceux de Couch’Surfing), plus le passage de quelques amis·es venus prendre des nouvelles ou demander un coup de main, et vous vous ferez une petite idée de l’animation qui règne en ce début de printemps dans nos quatre murs. La précocité saisonnière entraine aussi quelques bousculades dans le calendrier des travaux agricoles et la mécanique humaine ne suit pas forcément : mon genou fonctionne avec des hauts et des bas (plus de bas que de hauts ces derniers temps) et a du mal à accepter l’accélération du rythme d’activité ; le matériel de jardinage se rebelle aussi quelque peu… Tout cela s’accumule et je ne passe guère de temps devant le clavier ou dans la bibliothèque pour faire les recherches que demandent mes projets de chroniques actuels. Je dois dire que cela me convient aussi et que cela correspond au rythme naturel des saisons.
Le fait de faire appel à des volontaires du réseau Helpex simplifie certes notre existence mais ne réduit pas les problèmes à néant. Il faut que chacun·cune puisse effectuer ses trois ou quatre heures de travail quotidien dans de bonnes conditions. Cela demande un minimum d’effort d’organisation. Nous tenons particulièrement à ce que l’accueil soit chaleureux, les conditions de logement bonnes et la nourriture la meilleure possible et tout cela ne se fait pas en claquant du doigt ! Nos volontaires courageux nous apportent aussi du travail supplémentaire ! La gestion des repas demande de l’organisation et un peu de réflexion : il est rare que nous soyons le même nombre autour de la table deux repas consécutifs. Nous faisons aussi un peu de tourisme avec nos visiteurs ; il est rarement possible de leur laisser gérer seuls la totalité de leur temps libre. Nous ne vivons pas dans un lieu débordant d’activités culturelles, et mieux vaut préférer la lecture, la marche, la méditation plutôt que les sorties en boîte de nuit ou les soirées cinéma quand on est à la maison ! Comme je l’ai dit plus haut, l’entretien du parc matériel nécessaire au travail quotidien dans notre espace vert ne va pas sans créer quelques soucis. Faute de pouvoir acheter du matériel professionnel, trop onéreux, nous devons jongler avec les défauts de plus en plus nombreux de l’équipement réservé aux jardiniers du dimanche : quand ce ne sont pas les courroies qui lâchent sur les tondeuses, ce sont d’autres pièces. Les fabricants prennent un malin plaisir à truffer leurs appareils de pièces étudiées pour casser le plus souvent possible… La dernière tondeuse que j’ai achetée, il y a deux ans, et que je ménage pourtant vu sa santé fragile, s’avère être une source inépuisable d’emmerdements. Deux réponses à cela : soit l’on change de plus en plus souvent de machine, soit on achète des engins destinés aux collectivités ou aux professionnels, dont la durée de vie est deux ou trois fois supérieure, mais dont le prix et trois ou quatre fois plus élevé…
Comme cette activité autour du grand jardin ne nous paraissait pas suffisante et que nous trouvions la maison trop calme, nous avons innové depuis le début de l’an dernier en organisant, trois fois par an, des spectacles à la maison : chanson ou théâtre pour l’instant mais nous comptons bien élargir le champ de nos activités. Trois soirées sympathiques ont eu lieu en 2013 : deux avec des chanteurs (Christopher Murray et Rémo Gary), une avec une troupe de théâtre lyonnaise, la Compagnie Monsieur Cheval. Le succès rencontré nous a donné envie de persévérer et cette année au mois de mars nous avons reçu un quatuor vocal de chant traditionnel, QuartareM, et nous organiserons en juillet un deuxième concert avec un pianiste et deux chanteuses : MaMaz. Tout cela bien entendu ne nous rapporte pas une thune et ce n’est pas sur ces soirées que nous comptons pour acheter du café pour nos apprentis jardiniers ou des tondeuses toutes neuves pour mettre le gazon au pas. Le seul plaisir immense que nous tirons de ces soirées c’est la richesse de ces moments de bonheur partagé. Les artistes se partagent le chapeau garni avec plus ou moins de générosité par les spectateurs, et ont la joie de pouvoir échanger avec ceux et celles qui les ont écoutés lors du copieux buffet qui se déroule après chaque concert. Je suis toujours étonné par la convivialité de ce cérémonial et par la richesse des échanges impromptus qui ont lieu autour d’une part de quiche et d’un bon verre de vin du Roussillon (les 14° de ce nectar divin ne sont pas seuls responsables des yeux qui pétillent et des sourires qui s’épanouissent sur les visages !). Pascaline, qui se charge de la mise en place des spectacles, a découvert à quel point les informations doivent être répétées pour être lues et (éventuellement) comprises.
Comme dit la plus grande de mes petites filles, « c’est bien chez papi-mamie, il y a toujours du monde ! » Elle ne s’étonne plus trop de croiser des visages inconnus lorsqu’elle séjourne à la maison avec sa petite sœur, ni d’entendre des langages différents, même si – souvent – l’anglais domine. Cette année nous avons simplement décidé d’être un peu plus rigides dans l’organisation de notre planning et de ménager quelques périodes de tranquillité : nous avons choisi de conserver pour nous une petite semaine de « solitude » tous les mois quand c’est possible. Tout cela, histoire de ne pas oublier que nous avons des routines à préserver… Il faut bien que je regarde la télé au moins une heure de temps en temps histoire « d’amortir » cette fichue redevance et d’alimenter mes « humeurs du jour » ! Nous ne vivons pas dans le monde de Winnie l’ourson et il y a parfois des ratés, des frictions et des doutes, mais je ne vous en parlerai guère : la vague des moments heureux bat en brèche les brisants de la mauvaise humeur. Il y a les rendez-vous ratés, les explications incomprises parce que trop vite données ou dans un langage un peu trop hasardeux. Fichue tour de Babel au sein de laquelle chacun s’exprime avec un idiome différent… Fichus citadins pleins de bonne volonté mais qui ne distinguent pas toujours la fleur précieuse amoureusement bichonnée, de sa compagne sauvage dont il faut limiter l’envahissement. Mais par chance ils ne sont que minorité, et apprennent vite le B.A. ba du jardinage. Plusieurs de nos stagiaires sont d’ailleurs arrivés avec un solide bagage de connaissances horticoles et nous avons profité pleinement de leurs idées. Mon intérêt – nouveau – pour la permaculture est en grande partie lié à ces échanges fructueux.
Certains de nos visiteurs sont au contraire novices et découvrent la tondeuse à gazon, le compostage ou la plantation des arbres. C’est sympathique mais ça ne fait pas toujours notre affaire car nous aimerions bien, à certains moments, déléguer un peu ; mais il vaut mieux participer au travail (c’est sympa de bosser à plusieurs) et surveiller du coin de l’œil le bon déroulement des opérations. Il faut alors avoir de bonnes jambes et courir de la motobineuse qui n’obéit pas aux ordres donnés en anglais, jusqu’à la la jardinière débutante qui s’apprête à recouvrir les graines de carottes avec une bonne vingtaine de centimètres de terre. Les découvertes ne se limitent pas au jardinage ou au bricolage : il y a aussi ceux qui, par exemple, apprennent la joie du repas partagé, en commun sur la grande table, plutôt que le plaisir solitaire du réfrigérateur que l’on ouvre pour grignoter un bout de fromage.
Le profit que nous tirons de ces échanges n’est pas seulement matériel. Il y a pour nous la satisfaction de voir nos projets se réaliser, un peu plus vite que prévu, mais aussi celle, difficile à mesurer, de voir validés certains de nos choix de vie, une part de notre philosophie, et notre amour de la nature. Il y a la chaleur de ces embrassades lorsque l’on se quitte ou que l’on se retrouve, car il y en a qui reviennent et je ne pense pas que ce soit le masochisme qui les pousse à faire ce choix ! Bref, nous allons continuer à planter des arbres, à les entretenir mais aussi à partager le plaisir de les voir grandir avec d’autres. Certains de ces arbres sont parrainés, c’est à dire dédiés à une personne de notre entourage, comme ce bouleau de l’Himalaya que nous avons planté dimanche à la mémoire d’un beau-frère trop tôt disparu, ou ce mélèze planté à l’occasion de la naissance de notre petite voisine. D’autres arbres sont là simplement parce qu’ils sont remarquables ou que nous les avons remarqués. Le facteur, aujourd’hui, vient de me livrer un poivrier de Chine. Nous avons admiré ce petit arbre au jardin botanique de Bruxelles. La magie des envois par correspondance fait que, dès cet après-midi, il aura son petit coin à lui, pas trop loin de la maison.
Voilà une excuse toute trouvée pour vous quitter et aller profiter du chaud soleil de cette après-midi.
One Comment so far...
Patrick MIGNARD Says:
22 avril 2014 at 08:32.
A propos d' »agitation printanière » et d’une décision imbécile d’un maire stupide… celui nouvellement élu de Toulouse :
Plus d’info : http://www.ladepeche.fr/article/2014/04/12/1862309-toulouse-la-fin-des-prairies-urbaines.html