15 novembre 2008

Chansons… pour bousculer le temps qui passe !

Posté par Paul dans la catégorie : ingrédients musicaux; l'alambic culturel .

Les frimas de l’automne déjà bien engagé nous ramènent vers les salles de concert et les soirées conviviales au coin d’une guitare ou d’un piano chaleureux. Il existe, sur la toile, un site bien conçu qui s’appelle « qui chante ce soir ? ». L’association, et surtout le gars courageux et dévoué qui s’en occupe, présente et met à jour, scrupuleusement, un calendrier complet de tous les spectacles de chant que vous pouvez aller écouter, à Paris, mais aussi dans toute la France, y compris dans nos villages du fin fond de nulle part. Ce n’est pas sur ce site là qu’il faut aller pour vous informer sur la dernière prestation de Carla Bruni ou de Francis Cabrel, mais, si vous vous intéressez à la vraie chanson, engagée ou non, mais en tout cas à celle qui ne passe sur les médias qu’une fois tous les cent jours, alors, sautez sur l’occasion : « qui chante ce soir » aura certainement quelque chose à vous proposer ! D’autant que la chanson à paroles en France se porte bien, très bien, très très bien même, du moins sur le plan de la création, plus que sur celui de la réussite financière. L’association qui anime ce site s’appelle Tranche de Scène et propose, en parallèle, différents DVD réalisés à partir de ces concerts, autour d’un artiste et des confrères et des consœurs qu’il apprécie : Anne Sylvestre, Serge Utgé Royo, Claude Semal… vous parlent d’autres chanteurs, plus ou moins connus, et c’est original comme formule.

Grâce au précieux calendrier évoqué ci-dessus, mais aussi au petit courrier de rappel de l’association iséroise « chansons buissonnières », nous avons assisté, samedi dernier, à un double concert de très bonne tenue : pas de première partie, de deuxième partie, mais un premier récital du chanteur suisse vaudois Michel Bühler, suivi d’un tour de chant complet d’un autre monument de la chanson « hors circuit », Christian Paccoud. C’est une soirée dont nous nous souviendrons longtemps, de par la qualité du spectacle proposé, mais aussi par la complémentarité du répertoire des deux chanteurs. Michel Bühler a une voix chaleureuse, agréable, je dirais même reposante, et s’accompagne à la guitare acoustique. Ses chansons alternent humour et poésie, coups de gueule et profonde tendresse. Elles sont souvent introduites par un court récit, une anecdote ou un préambule. Le courant passe très vite entre l’artiste et la salle et cela fait plaisir d’entendre le public applaudir à certaines déclarations engagées plutôt que de gober les âneries de la télé. Le contact avec les spectateurs est chaleureux, facile et rapide. Michel Bühler, dans ses chansons, parle de la vie des « simples gens », des problèmes économiques, de la vie difficile des immigrés, de la bêtise des politiciens… avec des textes simples mais chargés de poésie et d’émotion. La trame de son tour de chant repose sur son dernier disque « Passant », mais il interprète également bon nombre de succès anciens. Michel chante depuis de nombreuses années et il a à son actif une solide collection de CD et de DVD que vous pouvez vous procurer sur son site. L’une de ses dernières compositions, intitulée « démocratie », parle de l’élection de « qui vous savez » dans notre bel hexagone. France Musique avait invité Michel Bühler dans l’une de ses émissions sur la chanson engagée, mais l’animateur n’a pas voulu diffuser ce « brulot » de crainte de se faire rappeler à l’ordre par sa direction… Vous pouvez donner un petit coup d’œil aux paroles de cette chanson : c’est la cent quatre vingt douzième d’une liste qui en compte pas moins de cent quatre vingt quinze, parmi lesquelles une collection de petits bijoux !

Après la pause, les lumières s’éteignent et on entend une voix puissante qui s’élève du fond de la salle. Christian Paccoud rejoint la scène en chantant et en rythmant sa marche par de grands claquements sur ses cuisses. Il attrape son accordéon et commence à jouer. A lui seul, sans sono, sans micros, il emplit la salle de sa voix et du jeu puissant de son instrument. Les chansons se succèdent et le bonhomme virevolte sur la scène : en avant, en arrière, chuchotant, criant, enchaînant des airs de musette et des sonorités moins conventionnelles. La scène donne l’impression d’être un ring et l’on se demande si le boxeur va tenir jusqu’au bout de la nuit… Les textes sont parfois très surréalistes, les histoires saugrenues, mais la magie opère et l’on est pris dans le tourbillon : la vie est explorée dans ses moindres recoins et l’on parle de solitude, de tendresse, de colère et de voyages. J’avais écouté, il y a quelques années, les chansons figurant sur l’un de ses CD et je n’avais pas trop apprécié, je l’avoue. En le voyant en concert, mon impression a changé du tout au tout : Paccoud et la scène ne font qu’un et donnent l’impression d’être indissociables. Il a le physique qui va avec son tour de chant et, en voyant le bonhomme, on comprend mieux sa puissance vocale ! Bref, il faut voir Christian Paccoud avant de l’écouter. Son spectacle ne vous laissera pas indifférent !

D’autres spectacles s’annoncent pour Novembre et Décembre : Gérard Pierron et Bernard Meulien (textes de Gaston Couté, cf chronique sur le blog en juillet) à Grenoble par exemple d’ici une semaine, puis d’autres, connus, méconnus, nombreux en tout cas. Ne soyez pas jaloux, allez sur le site de « Tranches de scènes », il y a sûrement quelqu’un de très bien qui chante un de ces soirs, près de chez vous, dans une petite salle sympa. Allez-y à ces concerts et soutenez la chanson d’expression française, la vraie… Les autres, les stars, n’ont pas besoin de vos royalties pour vivre ! Quant à « Tranches de scènes », si vous trouvez l’initiative intéressante, personne ne vous interdit d’adhérer à l’association pour la soutenir (cf site).

One Comment so far...

Pascaline Says:

15 novembre 2008 at 10:02.

Voici quelques mots que j’avais postés sur mes listes de prédilection au lendemain de ce spectacle bouleversant.

« Ses chansons sont des manuels de résistance » disait mon petit prospectus sur Michel.

Ah, ce Kosovar qu’il a pris en stop et dont il regardait les mains, comme s’il s’agissait d’outils, cet homme qui cherchait du travail ! Toutes ces existences en péril que nous croisons parfois…

Mon prospectus disait « Paccoud est un poing dans la gueule, un crachat dans la soupe » : le poing dans la gueule, ve l’ai pris, et v’en ai encore les mâchoires bloquées. Le nombre de dents crachées sur le tapis, j’ai pas compté.

Voilà. Je ne vous aurai pas fait partager ce que j’ai vécu, car il n’y a qu’une façon, c’est d’aller voir sur scènes ces deux « monuments ». Je vous y invite instamment…

C’est important de ne pas se sentir seul à penser comme on pense, et sûrement pas dans le droit fil de la pensée unique. C’est important de croiser, sur scène et dans la salle, de ces gens autres qui ont d’autres valeurs. C’est difficile de refaire le monde, mais il faut au moins retrouver ceux qui le désirent aussi fort et le gueulent à pleins poumons.

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