24 juillet 2022
Quelques notes de musique et un ou deux bémols cachés sous le tapis
Posté par Paul dans la catégorie : au jour le jour...; ingrédients musicaux .
Tourner la page,
passer du binage et du bêchage à l’accordéonage,
ça soulage.Trois notes d’accordéon
pour accompagner une p’tite chanson
valent bien un p’tit abandon
de la chasse au liseron.M’en va vous conter
en pianotant sur mon clavier
sous quelles notes je suis né,
par quelle portée
je fus guidé.N’allez pas imaginer
que je vais vous dévoiler
tous mes secrets
sur certains je resterai
muet
même si ça doit vous désoler.
Je crois que je peux dire que je suis issu d’une famille de musiciens. Point de professionnels patentés mais des amateurs à l’enthousiasme éclairé. C’est à la fois ma chance et mon malheur… Dans un cercle de passionnés, il est difficile d’imaginer que l’un des éléments puisse vouloir prendre la tangente. Dès que j’atteignis l’âge de raison (enfin le premier), je fus donc convié, avec insistance, à m’initier aux joies de la musique. En ces temps canoniques où les idées d’éveil et la pédagogie active ne fréquentaient pas les mêmes locaux que les doctes enseignants de la musique, je dus passer par l’enseignement du solfège et tout son cortège de joyeusetés pour avoir le droit d’approcher un quelconque générateur de sons. A cette époque lointaine, maintenant révolue – semble-t-il – je crois qu’il fallait accepter deux années de dictées musicales, de lectures de notes, de commentaires d’œuvres musicales et de comptines ânnonées pour pouvoir prétendre étudier la pratique d’un instrument. Cela complétait agréablement l’ennui d’une école, où ma seule joie était de trouver les contenus faciles à assimiler ou de gagner quelques billes à « pot » ou au « bouillon ». Pour compléter mon emploi du temps, il me faut aussi mentionner la corvée hebdomadaire et incontournable du catéchisme ainsi que les séances chez le dentiste à la grand-ville. Généralement l’une de ces trois activités annexes à l’école tombait au moment de l’épisode de ma série préférée à la télévision, genre Rintintin ou autre récit fabuleux. Certes, je reconnais que mes goûts audiovisuels de l’époque n’étaient guère prometteurs…
Ce parcours rituel accompli (do ré mi fa sol la si do), je pus enfin m’adonner aux joies du piano : les gammes et la méthode rose à gogo (clé de sol et clé de fa, poil au bras). Je ne me rappelle plus les raisons pour lesquelles j’ai émis l’idée d’abandonner la pratique de cet instrument à l’époque de mon entrée au collège. Je n’avais pas encore lu Bakounine, et rien, dans la lecture du Club des cinq, ne me poussait à une décision aussi extrême. En fait, si, je pense que je vois pourquoi. Je croyais que l’objectif des leçons de piano c’était d’apprendre à jouer de la musique classique et que – à cette époque – ni Mozart ni Schubert ne me faisaient triper. Comme j’étais dans une famille qui vénérait la musique (mon père passait une bonne partie de son temps libre à écouter des opérettes ou des enregistrements des grands classiques), abandonner un instrument, cela voulait dire simplement en commencer un autre. Dans la liste des choix qui me furent proposés ne figuraient ni la guitare électrique ni le saxophone… Je choisis la flûte traversière. Mes parents firent l’acquisition de cet objet de luxe. Dépense somptuaire, d’autant qu’il y avait déjà un piano à la maison, trésor issu d’un héritage familial.
Mon professeur de flûte était sympathique. Il était aussi professeur de gym et de technologie, matières pour lesquelles je n’avais guère le feu sacré. Je soufflais avec peine dans mon long bâton argenté. Mon compresseur interne avait un réservoir de petite dimension. C’est un instrument difficile et j’admire beaucoup celles et ceux qui sont arrivés à un niveau d’expertise que je n’ai jamais atteint, même s’il y a bien eu quelques concours ou épreuves rituelles de fin d’année auxquelles j’ai été présenté. Du collège, je suis passé au lycée et avoir du temps libre pour fignoler mes maquettes d’avion m’attirait plus que la musique « classique ». Pardonnez-moi chers mélomanes lecteurs, je préférais « la poupée qui fait non » au Boléro de Ravel. J’ai pris prétexte de l’assiduité que demandaient mes devoirs scolaires pour taper en touche et remiser la flûte dans une armoire. Ne restaient plus que les cours de musique au lycée qui étaient obligatoires. Dans une famille de musiciens, il est logique que le dernier rejeton fasse preuve d’un peu d’ouverture d’esprit et y assiste. Jusqu’en terminale, dans ces cours, je retrouvais tout ce qui m’ennuyait en musique depuis une douzaine d’années. C’est dire si je m’éclatais.
Réfugié dans ma chambre, je préférais écouter les disques des Beatles, des Stones, puis, plus raffiné encore, de Soft Machine ou Pink Floyd. Mon père faisait l’effort d’essayer de comprendre, mais n’appréciait guère les solos de batterie de Robert Wyatt, alors que Chopin lui paraissait nettement plus harmonieux. Mon année de terminale fut terrible pour tout le monde et pour moi aussi. La lumière d’une bougie apparut dans le long couloir obscur que je traversais depuis des années. Notre prof de musique de terminale, heureuse d’avoir encore quelques participants à son option, nous expliqua qu’aimer la musique cela concernait TOUTES les musiques, et qu’elle nous autorisait à apporter en cours les disques que l’on avait envie de partager avec les autres. Un véritable tsunami dans un univers que je croyais régi seulement par des règles inébranlables et un ennui incommensurable. Mes congénères bénéficièrent alors de l’écoute de quelques grands succès de la pop de l’époque.
Baccalauréat, Ecole normale, envol du nid familial. Encouragé par mon prof de philo (un esprit très ouvert également), j’ai dévoré Bakounine, Kropotkine et tous les saints de mon tout nouveau testament. Passée la borne fatidique des dix-huit ans, un nouveau volet s’ouvrit pour moi en musique. Les années 70, c’est l’époque du renouveau du Folk Song en France. Des clubs se forment comme le « Bourdon » à Paris ou la « Chanterelle » à Lyon. Il y a des stages, des concerts, des festivals… A Malataverne ou à Vesdun, on rejoue Woodstock en écoutant du blues, des bourrées et des valses. Pour moi, les nouveaux visages de la musique que j’aime ce sont Catherine Perrier, Christian Leroi Gourhan, Emmanuelle Parrenin et tant d’autres (« La Bamboche » en photo par exemple)… Marginaux, hirsutes, chevelus barbus… On passe allègrement des manifs contre la répression des manifs, aux rassemblements contre le nucléaire ou pour la libération de l’éducation, puis aux concerts les plus divers… En toile de fond, les créations de la Pop Music me font toujours aussi bien planer. « Revolution » du groupe Jefferson Airplane retentit avec enthousiasme sur ma chaîne stéréo (souvenir ému de mon premier achat avec mon premier salaire !) Bref une période d’exubérance extrême. Je reprends en main flûte à bec, violon ou mandoline. Grâce à mes nouveaux « maîtres à penser », je sais maintenant que c’est en jouant que l’on apprend un instrument, en enchainant des airs plus ou moins simples plutôt que des gammes stériles. Les grands artistes de musique populaire, les violonistes tziganes par exemple, n’ont jamais travaillé avec la méthode Rose, ça c’est sûr.
Un voyage en Irlande vient raviver ma passion pour le violon, mais les années passent et le travail quotidien s’impose peu à peu. La pédagogie, si l’on est tant soit peu impliqué, est une grande dévoreuse de temps. Les vacances, certes plutôt longues ne suffisent pas à combler la brèche. La vie de famille grignote les restes et la fatigue pousse à laisser les instruments dans l’armoire. Je passe à d’autres activités, passionnantes elles aussi : menuiserie, jardinage, bricolage tous azimuts.
Interlude représentant l’écoulement d’une bonne trentaine d’années…
Le jour où sonne l’heure de la retraite, je décide – puisque j’aurai des « milliers » d’heure de temps disponible (douce illusion), de me remettre à la musique. Alors… violon ? guitare ? ou bien un autre instrument classique du folk que je n’ai pas encore pratiqué. L’accordéon diatonique me paraît sympa. Je craque et j’achète mon premier piano à bretelles, mais un piano sans touches, avec des boutons et un soufflet qui vient compliquer mon existence puisque l’on peut jouer les notes de deux manières différentes sur le diatonique. La magie « Maugein » opère et je suis conquis.
Quinze années de pratique déjà… Je devrais avoir atteint des sommets et concurrencer les grands artistes du genre. Que nenni, car je me suis trouvé à nouveau confronté à une corbeille de difficultés… Les « milliers » d’heures de temps libre, c’était de la propagande. D’autant qu’en 2001 nous avions lancé cette idée débile et géniale de parc arboré. Alors il y a eu des hauts et des bas ; j’ai appris et j’ai désappris faute de pratique assidue. Heureusement, depuis quelques années, j’ai décidé d’être un peu plus sérieux et de belles rencontres ainsi qu’un beau projet m’ont permis de m’atteler sérieusement à ma pratique musicale. Depuis, les choses ont bougé, et je commence à tirer des airs intéressants de mon accordéon. D’autant que depuis quelques temps je suis passé à un « trois rangs » (la magie « Castagnari » a opéré) et que cela me permet d’accompagner ma compagne chantante avec deux autres musiciens compétents. Je postule pour une tournée dans les grandes salles de l’Hexagone dès 2050. J’espère être bientôt classé parmi « les jeunes espoirs du folk song »). Je vous tiendrai au courant.
Alors, bilan de cette histoire ? Eh bien je trouve que c’est une bonne chose que les pratiques pédagogiques musicales aient un peu évolué. Ce n’est pas par la contrainte que l’on donne le goût des choses à des garnements. En toute honnêteté, je dois reconnaître cependant que mes apprentissages de jeunesse m’ont grandement facilité la vie de retraité musicien à temps perdu, entre deux chasses au liseron. C’est vrai que je mémorise assez facilement les mélodies, mais que les paroles sombrent dans un trou de mémoire conséquent.
4 Comments so far...
Moriniere Says:
14 août 2022 at 00:52.
Si tu as des problèmes d’eau, un conseil.
Organises une Coupe du Monde de foot féminin u20 au Charbinat.
Celle de cette année se déroule au Costa Rica et il tombe littéralement des trombes d’eau.
https://www.youtube.com/watch?v=u_kPbn9g8Qw&t=204s
Zoë Lucider Says:
15 septembre 2022 at 17:54.
Mes enfants se sont heutés aux mêmes difficultés que vous; L’ainé a réussi à passer le cap et après le Hautbois, abandonné pour cause de difficulté à trouver un groupe de musique qui l’accueille, il jour désormais des claviers dans un petit groupe et commence à se produire ici ou là. Ma fille a abandonné le piano tant sa prof de Solfège était revèche. Elle est comédienne et a décidé d’essayer l’accordéon (facile à transporter dans ses pérégrinations.) Comme quoi, à plus de 30 ans de distance, les mêmes absurdités perdurent
Paul Says:
16 septembre 2022 at 08:07.
@ Zoë… D’un côté, je pense que la situation s’est un peu améliorée ; d’un autre, je n’en suis pas si sûr. Heureusement, aujourd’hui, il y a plus de « filières » pour assouvir sa passion instrumentale. Jouer dans un groupe en est une et une bonne. Cela fait deux ans que nous jouons à quatre et ça nous a bien motivés pour nous perfectionner. Merci pour cette visite toujours appréciée. Le blog charbinois somnole mais ne meurt pas !
Moriniere Says:
15 octobre 2022 at 23:58.
C’est bien beau, tout cela mais faudrait pas oublier quelques détails…
https://www.youtube.com/watch?v=AGBHFQadbfA