4 avril 2008
Comme un air de révolte ?
Posté par Paul dans la catégorie : Humeur du jour; le monde bouge .
Les pays occidentaux et leur impérialisme galopant vont-ils pouvoir continuer longtemps à piétiner la planète avec leurs gros sabots ? Certains évènements récents montrent qu’une partie des victimes de ce déséquilibre mondial semble ne plus vouloir se contenter des miettes que leur distribuent les multinationales et souhaite une évolution rapide des règles du « jeu » économique global. D’un côté, grève illimitée des travailleurs de la filiale locale de Renault en Roumanie, grèves à répétition des ouvriers de Nike au Vietnam, révoltes spontanées en Côte d’Ivoire, au Sénégal ou au Mexique contre l’augmentation exorbitante du prix des denrées de première nécessité… De l’autre côté, pertes colossales des banques occidentales qui, malgré de super profits dans d’autres secteurs, se trouvent mises en difficulté par des créances douteuses dans l’immobilier – pertes qui, il va sans dire, vont être comblées en grande partie par les finances publiques… Y’a pas à dire la machine n’est pas encore bloquée mais il y a des rouages qui grincent sérieusement !
Si tout cela ne nous montre pas encore l’issue du tunnel dans lequel nous nous trouvons, peut-être quelques lumières se sont-elles allumées dans l’obscurité ? L’angoisse dans tout cela c’est que la réponse unique du capitalisme en crise a toujours été la guerre. Le début du XXème siècle, par exemple, est caractérisé par une montée en puissance du syndicalisme ouvrier et par la multiplication des luttes sociales dans les pays européens et aux USA, entre 1905 et 1914. Toute cette énergie a été canalisée dans les tranchées et a donné lieu à l’affrontement que l’on connaît, entre les prolétaires de tous les pays, pour le plus grand bonheur des marchands d’armes et des fabricants de croix de bois…
Les spéculations en tout genre et le développement des agrocarburants (voir chronique agricole 1 sur le même blog) ont entraîné une véritable explosion du prix des céréales et, du coup, du prix de nombreuses denrées de première nécessité, pain ou tortillas, selon les continents. Tous les pays sont touchés, mais les conséquences ne sont pas les mêmes pour la population, par exemple si l’on compare la France et le Soudan. En France, on parle de baisse du pouvoir d’achat, dans les pays en voie de développement on craint une poussée en flèche de la malnutrition. En Côte d’Ivoire et au Sénégal, des manifestations ont eu lieu, à l’initiative d’organisations de consommateurs, pour réclamer une baisse du prix des produits de base, en particulier du riz, de l’huile et du savon. A Dakar, la répression a été violente et il y a eu de nombreuses arrestations, mais le mouvement de protestation contre « la cherté de la vie » est loin d’être terminé. Le scénario a été identique à Abidjan : arrestations, nombreux blessés. Les gouvernements de ces deux pays mettent en avant le côté mondial de la crise et accusent leurs oppositions respectives de « manipuler » les citoyens. Dans les faits, le prix des denrées sur les marchés augmente tous les jours. On constate parfois des hausses tarifaires de 30 ou 40 pour cent en une semaine. Les salaires ne suivant pas une telle courbe, certaines familles ont dû, purement et simplement supprimer un repas, ou réduire de façon drastique les dépenses dans d’autres domaines comme la santé et l’éducation…
L’information circulant de façon « planétaire », les ouvriers de l’usine Ching Luh Shoes, sous-traitant de Nike, au Vietnam, sont parfaitement capables de faire la comparaison entre le prix exorbitant auquel sont vendues leurs productions et les salaires de misère qu’ils touchent en fin de mois. 17 000 salariés se sont donc mis en grève illimitée pour exiger « 8 euro de plus par mois » soit une augmentation de 15% de leur salaire actuel (comme vous êtes d’excellents matheux, je vous laisse faire l’estimation du salaire mirobolant qu’ils empochent – salauds de profiteurs !) La direction de Nike avait déjà dû faire face à une autre grève importante au mois de décembre chez l’un de ses autres sous-traitants. La réaction a été brutale : après 48 h de débrayage, une partie des ouvriers ayant refusé de reprendre le travail et des affrontements violents s’étant produits, la direction a fait fermer l’usine. Elle ne sera rouverte que lorsque tous les salariés accepteront l’augmentation proposée par les dirigeants… En fait, les grèves se multiplient au Vietnam, les ouvriers n’acceptant plus les salaires indécents que leur distribuent les multinationales dont les usines abondent dans le pays. Là encore, c’est la flambée des prix des denrées de consommation courante qui a mis le feu aux poudres.
Autre paradis pour les entreprises capitalistes, plus proche de chez nous, la Roumanie. Là aussi, la grogne commence à se faire entendre. Les ouvriers de Dacia qui fabriquent la Logan à la chaîne ne se contentent plus d’un salaire moyen brut de 1064 lei (soit 285 euro). Leur gourmandise risque de mettre en péril notre constructeur national puisque les bougres ne réclament pas moins de 148 euro supplémentaires par mois, en arguant mesquinement que leur entreprise a réalisé un profit de 150 millions d’euro l’an dernier… La direction leur a proposé généreusement le quart (pas des 150 millions, faut pas rêver, on n’est pas dans un conte de fée, mais de ce qu’ils réclamaient !) mais les a aussi prévenus que s’ils avaient le toupet de se mettre en grève générale, ce cadeau somptuaire serait remis en cause. Que la hausse de la productivité soit au rendez-vous, pas de problème, mais il ne faudrait quand même pas que ces travailleurs roumains réclament une égalité de traitement avec leurs camarades français (sinon, à quoi bon délocaliser ?) Selon leur bonne habitude, les médias ont parlé de cette grève, puis ont gentiment passé le sujet à la trappe à partir du moment où le mouvement s’est prolongé plus d’une semaine. Chez nous, on n’aime pas les grèves qui durent, surtout chez Renault, surtout quand on approche du mois de mai et de son cortège de commémorations-enterrement.
La France dort. Chut ! pas de bruit ! Les lycéens vont-ils la réveiller ?
NDLR : photo manifestation Abidjan : AFP – photo manifestation Dacia : Agence Reuters – photo usine Nike Vietnam : origine inconnue.
3 Comments so far...
Paul Says:
5 avril 2008 at 07:13.
« PORT-AU-PRINCE (AFP) – Quatre personnes ont été tuées par balles vendredi dans le sud d’Haïti au cours de violentes manifestations qui secouent le pays depuis deux jours pour dénoncer la pauvreté et le coût de la vie. »
Clopine Trouillefou Says:
5 avril 2008 at 07:23.
Pas de rapport avec l’article du jour, mais sachez que du côté du Pays de Bray, votre audience s’accroît : nous avons donné vos coordonnées à tous les membres de l’Association Rurale Brayonne pour le Respect de l’Environnement (ARBRE) : ainsi les potes auront de saines lectures !
:>))
bien à vous et merci !
Clopine, Clopin, Clopinou et tutti quanti.
sylvaine vaucher Says:
5 avril 2008 at 10:02.
Le 25 juin 1854, les militaires français fondent au sud-ouest de la Grande Terre Port-de-France pour servir de chef-lieu à la colonie, simple garnison qui deviendra rapidement une petite ville et prendra le nom de Nouméa le 2 juin 1866.
Après la Commune de Paris, la Nouvelle-Calédonie, sert de lieu de déportation pour de très nombreux anciens communards condamnés par les conseils de guerre mis en place par le gouvernement Thiers.
À la fin du XIXe siècle et au début du XXe plusieurs tentatives de colonisation sont des semi-échecs
En 1931, un groupe de Kanaks sont exposés comme anthropophages dans un enclos de cases, au jardin d’acclimatation du Bois de Boulogne, à l’occasion de l’exposition coloniale de Paris[4].
Durant la Seconde Guerre mondiale, la Nouvelle-Calédonie rallie la France libre dès 1940 et devient à partir du 12 mars 1942 une importante base arrière américaine dans la guerre contre le Japon.
Après la guerre, la France abandonne le terme de colonie, abolit le code de l’indigénat. En parallèle, le Territoire connaît une croissance économique rapide et importante grâce à l’exploitation de « l’or vert »: c’est le « boom du nickel », la Nouvelle-Calédonie devenant alors le troisième producteur mondial.
Les années 1980 voient les tensions entre opposants et partisans de l’indépendance atteindre leur paroxysme, les affrontements dégénérent bientôt en insurrection quasi généralisée durant la période dite des « Événements » (1984-1988). La violence culmine en 1988 avec la prise d’otage d’Ouvéa.
Cet épisode pousse les deux camps et leurs leaders à négocier aboutissant à la signature des Accords de Matignon le 26 juin 1988 prévoyant la mise en place d’un statut transitoire de 10 ans devant se solder sur un référendum d’autodétermination pour que les Calédoniens se prononcent pour ou contre l’indépendance. Cet accord est complété par l’Accord de Nouméa du 5 mai 1998 qui prévoit alors la mise en place d’une autonomie forte. Le référendum final sur la question de l’avenir institutionnel (indépendance ou maintien au sein de la République française) étant repoussé entre 2014 (qui sera président ? et où le choisir ?) et 2018.
Il fait beau aujourd’hui…et le ciel s’est mis à l’heure….pour combien de temps ? L’histoire se répète comme si elle avait perdu la mémoire !