5 mars 2012
Le nucléaire civil c’est trop balèze, mieux vaut ne pas s’en servir pour ne pas l’user…
Posté par Paul dans la catégorie : Feuilles vertes; Humeur du jour .
En fait, si j’ai bien compris les propos de la bande d’ineffables amuseurs publics d’experts compétents, qui essaient de nous dérider ramener à la raison, depuis quelques mois, les habitants de Fukushima, de Tchernobyl, de Three Mile Island, ont eu un bol pas possible. Grâce aux accidents nucléaires qu’ils ont eu la veine d’avoir dans leur petit coin de campagne, ils bénéficient, ou vont bénéficier (ça dépend de quand a eu lieu l’incident nucléaire mineur chez eux) de conséquences archi-positives. Le meilleur exemple est fourni par Tchernobyl. Depuis que le pétard sans odeur nauséabonde a légèrement fusionné, la nature ne s’est jamais aussi bien portée. Je ne l’invente pas puisque c’est Monsieur Jancovici, polytechnicien et grand supporter de Nicolas Hulot, qui le déclare, Monsieur Claude Allègre qui le répète, et Monsieur Eric Besson qui en est pleinement convaincu. La zone de Tchernobyl est un sanctuaire de nature ; l’homme n’y met plus les pieds et les zanimos y sont donc les rois. Après s’être livré à de très sérieuses expertises, le numéro un du trio est formel : très peu de malformations, les espèces s’adaptent et certains animaux qui avaient disparu du secteur ont reconquis ce nouvel eldorado de verdure. Je ne caricature aucunement ; il suffit de consulter le site « Manicore » sur lequel s’exprime ce monsieur, et plus particulièrement la page « discussion autour de quelques idées reçues sur le nucléaire civil ». On y trouve des informations de ce style : « l’accident de Tchernobyl a paradoxalement aussi eu une conséquence positive sur « l’environnement », tout simplement en conduisant à l’évacuation des hommes dans un rayon de 30 km autour de la centrale, devenus inhabités depuis 15 ans. En effet, la suppression de quasiment toute présence humaine (l’homme est de très loin le premier « prédateur » du milieu naturel) est considérablement plus impactant – dans le sens positif – pour l’environnement que le fonds de radioactivité supplémentaire que l’accident a engendré près de la centrale ! Des comptages effectués indiquent, par exemple, que bon nombre d’animaux prospèrent désormais dans la « zone interdite » bien plus qu’avant l’accident. Quoi que cela ne soit pas du tout politiquement correct d’énoncer les choses ainsi, on pourrait dire, en caricaturant à peine, que Tchernobyl a converti, de force, des terres agricoles (et une ville) en réserve naturelle (une « réserve naturelle » n’est en effet rien d’autre qu’un endroit où l’homme est prié de ne pas habiter, et de se déplacer sur la pointe des pieds). Le niveau de radioactivité y est certes plus élevé qu’avant l’accident, mais comme il est exposé plus haut cela ne gêne pas l’immense majorité des êtres vivants qui s’y trouve, et dans une large partie de la zone cela ne gênerait même pas les hommes s’ils décidaient d’y retourner. »
Si vous avez particulièrement mauvais esprit – ce qui n’est pas mon cas, je vous préviens tout de suite – vous pouvez compléter cette lecture édifiante par le texte de Valéry Laramée de Tannenberg intitulé « Tchernobyl, destructeur de biodiversité » que Fabrice Nicolino a publié sur son blog, « planète sans visa ». Moi personnellement, j’ai lu une partie des textes fondamentaux qu’ont pu écrire sur la question les membres du trio sus-cité (la preuve qu’ils sont sérieux c’est que les pieds nickelés étaient trois eux aussi et qu’ils ont fait un carton !), et je suis convaincu. En fait, quand je vois tous les bienfaits que peut nous apporter le nucléaire civil, et surtout les accidents mineurs qui émaillent parfois l’historique du fonctionnement des centrales, mon seul regret c’est qu’il n’y en ait pas plus (de centrales ET d’accidents). J’ai la chance de vivre au centre d’un triangle d’or quasiment paradisiaque (Bugey, Cruas, Malville) et malgré tout je ne bénéficie que d’une quantité de retombées radioactives vraiment minimes. Du coup je ne peux pas vraiment profiter au maximum du bien-être que devraient m’apporter la présence de ces centres d’agrément. De là à ce qu’on nous explique bientôt que Nagasaki et Hiroshima ont eu des conséquences formidables pour la biodiversité au Japon… (censuré).
Pour aller plus loin dans ma réflexion, je me dis même que c’est dommage de considérer le nucléaire comme un pis-aller, ainsi que le font certains hypocrites plus ou moins de gauche. Les discours genre « oui c’est vrai, il y a quelques problèmes – les déchets entre autres – mais à cause du réchauffement climatique, à court terme y’a pas mieux » ou bien « maintenant c’est trop tard, on ne peut plus revenir en arrière, les choix sont faits »… Je trouve que c’est vraiment trop réducteur comme énoncé. En fait, le nucléaire civil c’est un truc tellement balèze que c’est presque dommage de l’offrir à des citoyens qui ne le méritent pas. Nous allons d’ailleurs porter derechef ce message de paix, d’amour et de tolérance aux arriérés qui vont se réunir pour former une chaîne humaine dans la vallée du Rhône à l’occasion de l’anniversaire du happening de Fukushima. En étant un peu pédagogue, je pense que je n’aurai pas de mal à leur expliquer qu’en fait ce rassemblement doit être festif car les Japonais ayant évacué la zone proche donnent une chance inespérée à la nature de se « renaturer ». Si ça se trouve, avant cet emballement festif des réacteurs il n’y avait plus que quelques milliers de grenouilles à quatre pattes dans la région. Imaginons que le nombre de grenouilles se multiplie par dix, et que le nombre de pattes de chaque amphibien se multiplie par deux : d’ici quelques années, le Japon pourra massivement exporter des cuisses de grenouilles vers la France. Si ça se trouve, avec la crise qui se prolonge, on n’aura plus que ça à manger, des cuisses de grenouilles irradiées pas trop chères… Il paraît que la tourbe ukrainienne des environs de Tchernobyl, après avoir accompli un parcours compliqué (transit par la Lituanie, embarquement dans des cargos en direction de l’Union Européenne, déchargement à Dunkerque et ailleurs, nouveau transport en camion…) aurait fini par aboutir dans de bons vieux sacs de terreau pour jardinage commercialisés dans certaines grandes surfaces. J’aimerais qu’une étude scientifique soit conduite par le trio nickelé pour démontrer que dans les jardins ainsi fertilisés, les choux contiennent trois fois plus de vitamines et que les carottes n’ont point de tumeurs au cerveau. Le problème – que ne manqueront pas de soulever certains grincheux – c’est qu’avec l’âge, je deviens amnésique, et incapable de citer mes sources…
Peut-être que vous aussi vous allez participer à cette sublime manifestation le long de la nationale 7 – chaîne humaine sur laquelle vous pouvez vous informer et vous inscrire à cette adresse ; dans ce cas, peut-être nous rencontrerons-nous le dimanche 11 mars. Je serai facile à repérer. J’emporte un fût de déchets radioactifs russes (il en traine partout) et je compte bien me hisser dessus (je ne suis pas grand) pour attirer l’attention de la foule d’illuminés qui va nous entourer, et essayer de ramener les brebis égarées dans le troupeau. Autre signe de reconnaissance : je porterai un Tee-Shirt avec la silhouette de Claude Allègre devant, la photo de Besson dans le dos, et, pour compléter ma panoplie, j’ajouterai sans doute une casquette FNSEA : Fédération Nationale des Soutiens de l’Energie Atomique. Tous ceux qui écouteront l’intégralité de ma plaidoirie pour l’atome auront la chance de repartir avec une petite fiole de cesium 137 qu’ils pourront verser goutte à goutte dans les filtres de la VMC de leur habitation. A condition de porter, pendant quelques temps, une combinaison NBC adéquate, ils s’apercevront que – vraiment – le nucléaire est aussi incontournable qu’inoffensif.
Ce qui devrait me rassurer pleinement c’est que tous les candidats aux prochaines présidentielles, jugés « sérieux » par les médias « responsables » sont peu ou prou (plutôt prou que peu d’ailleurs) favorables au maintien du cap énergétique « nucléaire for every french body » (grâce à l’atome je deviens polyglotte). Ça fait un moment que l’on savait que le lobby « école des Mines, Areva, Edf » avait bien fait son travail de noyautage. Cette évidence est encore une fois démontrée : des bérets-baguettes d’extrême-droite aux casquettes CGT, tout le monde est prêt à miser sa culotte sur les radiations franco-françaises. Déjà que les radiations ex-bolcheviques n’ont que des effets bienfaiteurs sur l’environnement, il est clair que des radiations franco-françaises ne peuvent qu’aider le coq gaulois à améliorer la qualité de ses cordes vocales. Pauvres Allemands qui en sont réduits à tout miser sur le soleil, le vent et autres fanfreluches. Comme le faisait judicieusement remarquer un homme averti avec qui j’ai eu la chance de faire tablée commune cette semaine : une centrale nucléaire c’est plusieurs milliers de mégawatts ; tu imagines le nombre d’éoliennes qu’il faudrait pour égaler tout ça ? Heureusement que personne n’a eu la grossièreté de lui faire remarquer que des grandes hélices il en faudrait beaucoup si l’on persistait dans la voie de la surconsommation et du gaspillage ou que l’on n’était pas forcément obligé de raisonner la production énergétique uniquement en terme de centralisation, que les sources d’énergies pouvaient être diversifiées… Tout le monde était sous le charme de ce discours majestueux sur la beauté rayonnante d’une tour de refroidissement, le soir, au coucher du soleil, dans la vallée de la Loire… Tout à fait autre chose, sur le plan poétique, qu’une hideuse pale d’éolienne. Cet homme parlait avec son cœur.. Je ne pense même pas qu’il avait éprouvé le besoin de lire le petit guide de conversation élaboré, à l’occasion des fêtes de fin d’années, pour les cadres de l’industrie électro-nucléaire pour les aider à animer les soirées festives dans des familles d’écolos arriérés.
Ma conclusion d’expert bénévole, dont les revenus mensuels sont légèrement complétés par des versements illicites mais néanmoins fort utiles, est toute simple : d’accord le nucléaire on consent à vous en remettre une couche pour trente ans mais il va falloir faire preuve d’un peu plus d’enthousiasme. Il nous faut des contreparties sonnantes et trébuchantes : engagez-vous par exemple à acheter les livres de Claude Allègre le lendemain de leur parution, allez faire du tourisme dans les zones irradiées au lieu de fuir lâchement, et surtout ne vous laissez plus influencer par les adeptes du riz complet à la sauce de soja et des oreillers en noyaux d’abricot. Ne faites plus semblant d’accepter le nucléaire, plébiscitez-le, ça fera plaisir à ……… qui vous voudrez. Cette histoire de déchets c’est de la foutaise… Ils ne sont vraiment dangereux que pendant quelques dizaines d’années selon l’un des piliers du trio mentionné plus haut. A court terme, ils émettent plus de billets de banques que de radiations pour les populations impliquées dans leur conservation.
NDLR : source de l’image 3 = http://www.scoop.it/t/anti-nuclear-anti-nucleaire
Excusez le ton un peu confus de ce billet, mais il avait été écrit par un jeune écolo stagiaire à la rédaction et le grand manitou a dû essayer de le remettre dans le droit chemin (pas le jeune ! à soixante balais ou presque il est irrécupérable, mais l’article).
4 Comments so far...
Pascaline Chion Says:
5 mars 2012 at 17:25.
DROIT DE RÉPONSE
Eh, déconne pas ! J’y étais moi aussi à la tablée commune avec cet homme averti.
Et je n’étais pas tombée sous le charme de cet individu dont je n’ai pas entendu le discours, parce que je chahutais au fond de la classe, ou quelque chose comme ça…
Heureusement que tu prenais des calmants en fortes doses. Mais au retour, pas grisé du tout, tu nous as ramenés en conduisant remarquablement bien.
Heureusement que tu tiens un blog, comme ça je sais ce que tu oublies de me raconter !
fred Says:
12 mars 2012 at 08:04.
je vais finir par vous croire à la fin !
moi qui croyais tant à EDF !
(Ps Paul, je t’ai mis ma nouvelle adresse mail (à force ne plus pouvoir payer orange !) si tu pouvais me « recréer » dans la liste des Dragonneries !)
Eric GEIRNAERT Says:
4 décembre 2014 at 06:39.
La France, pays nucléaire, a ses petites biosphères « pures » de biodiversités !!!!
Le nucléaire booste, le moteur de biodiversité, c’est démontré au moins par les monstres de plus en plus nombreux…
Pour éviter d’affirmer des choses sans preuve, menons des observations de terrain. La France a son terrain biologique d’étude « nucléarisé – pollué ». Voir:
http://seclin.tourisme.free.fr/eau/Escargot_mutant.html#radioactivite_monstres