9 juillet 2008

Marina Petrella n’ira pas à Lourdes…

Posté par Paul dans la catégorie : Humeur du jour .

Les militants des FARC qui seraient tentés d’accepter la proposition d’un statut de réfugiés politiques en France en échange de leur renoncement à la lutte armée et de la libération de tous les otages détenus par leur mouvement, feraient bien de réfléchir à deux fois, compte tenu de ce que vaut la parole de l’Etat français. Le président actuel (d’un certain nombre de citoyens de notre pays) vient de donner son accord à l’extradition en Italie de l’ex-militante des Brigades Rouges Marina Petrella, laquelle avait bénéficié, de la part du Président François Mitterrand, d’un engagement de non extradition en échange de l’abandon de toute activité militante illégale. Deux autres militants italiens avaient bénéficié de cette « jurisprudence » Mitterand : Cesar Battisti et Paolo Persichetti. Tous deux ont été « trahis » de la même manière par l’Etat français (et par le même individu, Ministre ou Président selon les années). Persichetti a été extradé en 2002 et Battisti a été arrêté à Rio de Janeiro en mars. Une demande d’extradition du Brésil a été déposée par la France. Elle n’a pas abouti pour l’instant. Mon propos n’est pas de discuter de la culpabilité des uns ou des autres, mais de la manière dont notre gouvernement tient ou non parole. Si la validité d’un engagement ne tient que ce que dure un mandat présidentiel, les futurs « réfugiés » des Farc ont intérêt à prendre quelques précautions !

Marina Petrella, âgée de 54 ans, a été arrêtée en août dernier. Son état de santé est actuellement très préoccupant : dépressive, à tendance suicidaire, elle est actuellement soignée dans l’unité psychiatrique de la prison de Fleury Mérogis. Ses amis, sa famille, son avocate, considèrent qu’un transfert dans les mains de la justice italienne aurait des conséquences tragiques, d’autant qu’elle a été condamnée à la prison à perpétuité. Notre petit timonier faisant des efforts de communication et souhaitant éviter qu’on ne l’affuble de l’étiquette de « bourreau » (les services de l’Elysée n’admettent déjà pas qu’on le qualifie de « méchant »), a recommandé à son « ami » italien, le pitre qui traîne derrière lui plus de casseroles judiciaires qu’un chef de la mafia sicilienne, d’être « généreux » et d’intervenir auprès du Président italien pour qu’une grâce soit envisagée… En ce qui nous concerne, nous autres citoyens du bas de l’échelle, nous avons en tout cas une démonstration de plus de ce que vaut la parole d’un Etat. La romancière Fred Vargas, dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises dans ces colonnes, a dénoncé l’incohérence totale de cette extradition : on ne peut pas, à la fois, proposer d’accueillir les guerilleros des Farc, et extrader une militante des Brigades Rouges qui bénéficiait d’un statut de neutralité de l’Etat français à son égard. Le Syndicat de la magistrature a dénoncé des «petits arrangements entre amis» à propos de la demande de grâce.

On ne sait pas trop où en est l’Europe des citoyens, mais l’Europe des polices elle, est de plus en plus opérationnelle. Les militants basques arrêtés en France et livrés systématiquement en Espagne en savent quelque chose ! Police partout et sans frontières, Justice ?

Espérons que lors de sa tournée de prières à venir, pendant son voyage à Lourdes ou son excursion au Vatican pour serrer la pogne à Benoît, notre ex-otage franco-colombienne profitera de son aura auprès des medias pour intervenir au sujet de Marina Petrella, et rappeler qu’un Etat ne saurait pratiquer la politique judiciaire du « deux poids, deux mesures ». J’ai cependant des doutes car il semble que la longue séquestration de Madame Bétancourt ait laissé des séquelles graves sur son comportement politique… Tant qu’elle y est, si elle se décide à faire un petit geste, elle pourrait aussi évoquer le sort d’un autre otage, franco palestinien (mère française, père résidant à Jérusalem), Salah Hamouri, emprisonné depuis trois ans, sans procès, dans les géôles israéliennes. Là aussi, deux poids deux mesures : le gouvernement français qui intervient auprès des Palestiniens pour la libération de Gilad Shalit soldat israélien capturé lors d’une opération militaire, se déclare incompétent dans le cas de Salah Hamouri, car il ne veut pas « interférer dans le cours de la ‘justice’ israélienne » (justice militaire, va de soi, comme si les deux mots pouvaient fonctionner ensemble…).

3 Comments so far...

Paul Says:

10 juillet 2008 at 13:57.

Ajout à la chronique ci-dessus. Extrait d’un article provenant du site lepoint.fr :
Marina Petrella, l’ancienne membre des Brigades rouges dont l’extradition est réclamée par l’Italie pour fait de terrorisme, se laisse mourir en France où elle a refait sa vie depuis 1993 « à visage découvert », selon ses proches. Cette femme, qui aura 54 ans le 23 août, présente un regard déterminé sur les photos illustrant les sites Internet de ses comités de soutien. Mais elle a écrit récemment « des lettres d’adieu » à son conjoint, ses deux filles de 25 et 10 ans et à son amie et ex-collègue Stéphanie Lacroix.

« Marina dit aujourd’hui clairement qu’elle préfère mourir libre plutôt qu’enterrée vivante », raconte Mme Lacroix. En terme médical, cela donne un « état dépressif gravissime » avec des « idées de mort extrêmement prégnantes » et une « sensation d’avenir bouché », « l’ensemble évoquant une crise suicidaire franche et très inquiétante », selon le certificat d’un médecin de Fresnes.

« Ma cliente est en train de mourir », insiste l’avocate Irène Terrel qui se bat pour l’application immédiate d’une « clause humanitaire » suspendant l’extradition de Marina Petrella, arrêtée le 21 août 2007 à Argenteuil (Val-d’Oise), où elle habitait. Marina Petrella vivait « en France à visage découvert » au nom de la « doctrine Mitterrand » accordant l’asile en échange de l’arrêt des violences, déclare Stéphanie Lacroix….

Une pétition peut se signer en ligne à cette adresse :
http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=51798#sp51798

Paul Says:

17 juillet 2008 at 08:56.

Salah Hamouri
Emprisonné pour supposé délit d’intention par les autorités israéliennes, le jeune Franco-palestinien envoie un message du fond de sa prison
J’ai reçu vos messages et les livres et je suis très heureux et très touché par votre mobilisation. Je vous remercie ainsi que tous mes camarades.
Nous croyons en la solidarité entre les peuples du monde, la résistance palestinienne et notre combat font partie de la lutte contre l’occupation des états tout puissants.
Vos messages nous apportent soutien et réconfort, nous ne sommes pas seuls –pour aller vers la victoire et vers un monde avec plus de paix de liberté et d’égalité.
Je vous remercie encore une fois ainsi que tous les prisonniers politiques palestiniens.
J’espère que nous pourrons rester en contact. Merci pour votre solidarité
(info reprise dans Altermondes 17 juillet)

Salah Hamouri
et ses camarades détenus dans les prisons de l’occupation israélienne

Paul Says:

24 juillet 2008 at 08:20.

Toujours concernant Marina Petrella
Elle a été transférée mercredi à l’hôpital Sainte-Anne pour y être soignée. Selon ses médecins, Marina, 54 ans, est en « abandon de vie », atteinte de « troubles dépressifs et suicidaires » et souffre de « dénutrition ». Depuis son arrestation en août 2007, elle a perdu 20% de son poids et pèse aujourd’hui 39 kg. Son compagnon a pu lui rendre visite et elle lui a déclaré : « ils ne renverront que mon cadavre ».

Sa fille aînée a dénoncé, mercredi 23 juillet, le ton s’apparentant à de « la non-assistance à personne en danger » employé par la ministre de la Justice Rachida Dati, qui avait déclaré mardi que Marina Petrella, menacée d’extradition vers l’Italie était « bien soignée ».
Sur France Culture, Elisa, 25 ans, a déclaré : « on est en face d’une personne qui est en train de dépérir, de mourir (…) son coeur ne va pas encore tenir comme ça longtemps »…
Selon Rachida Dati, « l’état de santé de Marina Petrella est très bien pris en charge, son pronostic vital n’est pas engagé, ce sont les déclarations des médecins » et « elle est soignée et bien soignée ».
« Une chose dite sur ce ton me semble plutôt une sorte de non-assistance à personne en danger », a réagi la fille aînée de l’ancienne activiste. Marina Petrella est également mère d’une fillette de 10 ans.
Elisa « n’accepte pas » ce discours, « ne serait-ce que par décence pour (les) proches qui souffrent aussi de cette situation ».
Elle a plaidé pour une décision administrative de levée d’écrou qui permettrait à sa mère « d’aller se faire soigner » hors détention, « de récupérer ce qui va lui permettre de vivre ». « Je crois qu’on a tous en nous la dose d’humanité nécessaire » pour prendre « immédiatement » une telle décision, a-t-elle assuré.
[infos relevées sur nouvelObs.com et RFI)

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